Vous connaissez ce type. Ce gars-là qu’on déteste tous. Celui qui, alors que tout allait bien, alors que le courant passait du tonnerre avec les jeunes filles, finit par se pointer en soirée avec deux heures de retard sa guitare sous le coude. Il explique à quel point ce qui vient de le retarder était incroyable et en profite pour commencer un bœuf à la guitare parce que le son est pas à la hauteur et que parce que c’est toujours sympa un petit bœuf, non ? Vous savez c’est ce type-là, le beau gosse, à la voix sensuelle, et qui finit toujours par vous reléguer au fin fond de la salle, à siroter votre énième verre avec vos amis geeks ou ceux déjà en couple. Bref, autant dire que la soirée est finie pour vous. Et bien Peter Von Poehl a surement, à un moment de sa vie, fait partie de ces mecs-là. Ceux qu’on aurait aimé balancer par-dessus le balcon.

Pourtant, en s’attardant un peu sur la carrière du jeune homme, on ne peut pas vraiment affirmer que se soit un gars comme-ça ! Non. Ce n’est pas vraiment le genre à se mettre au devant de la scène et à prendre la meilleure place. Durant quasiment dix ans, il était plutôt là, sur le côté, le gars qui joue de la guitare, qu’on remarque parce qu’il n’est quand-même pas mauvais. Il aura écumé les plus grandes salles accompagnant notamment A.S. Dragon ou encore Bertrand Burgalat, mais aussi un certain Michel Houellebecq !

Il aura fallu ce temps et la persuasion de ses amis artistes pour que Peter Von Poehl décide enfin à prendre son envol, tout seul et en son nom. Et ses débuts en 2006 étaient vraiment bluffants. Il faut dire que l’époque était aussi propice à ce style de musique. Jim Noir sortait lui aussi un excellent album, Tower of Love, dont les tubes Eanie Meany ou encore My Patch n’ont pas laissé indifférent. Mais aussi Gotye, qui avant de connaître son succès actuel, avait réalisé un bien meilleur album, Like Drawing Blood, passé malheureusement plus inaperçu.

Le premier opus de Peter Von Poehl, Going Where The Tea Trees Are, a fait son petit effet, avec des chansons devenues aujourd’hui des classiques dont notamment The Story Of the Impossible. L’album est rempli de chansons formidables, dont on retiendra notamment A Broken Skeleton Key, Travelers ou encore Scorpion Grass. Une très belle entrée en matière donc, pour le prodige de la guitare qui dévoile ainsi un univers très délicat et enivrant, une voix douce et captivante, des mélodies touchantes et entrainantes.

Le second album sera dans la même lignée, mais n’atteindra pas les sommets du premier. Malgré un bon démarrage avec la chanson Parliament, l’album s’embourbe un peu dans la mélancolie même si on se laisse très facilement porter par l’ensemble. Car finalement, Peter Von Poehl sait quand-même sortir de bonnes cartouches sur la deuxième partie avec Mayday, Lost In Space ou Moonshot Fall. L’album May Day, qui reste tout de même très respectable, porte peut-être bien son nom. Sans doute Peter Von Poehl cherchait-il un second souffle en nous appelant au secours !

Mais, même si l’envie ne manque pas, inutile de s’étaler davantage sur ces deux albums, car l’actualité incite à passer un peu plus de temps sur le dernier né de Peter Von Poehl. C’est en ce début de printemps que le suédois a décidé de sortir Big Issues Printed Small. Un troisième album donc, qui sans surprise, développe toujours le même univers que les précédents. Ceci étant, Peter Von Poehl revient avec de très bonnes intentions qui dès les premières notes accrochent l’auditeur. On le retrouve revigoré et plein d’entrain et ce n’est pas pour nous déplaire. Certes, les fameuses balades sont ici en majorité, mais l’album, resserré sur dix pistes, renferme des chansons d’une teneur non négligeable. Avec Orders and Degrees, le démarrage annonce donc la couleur en douceur, mais les petites notes électroniques attisent l’attention et surprennent un peu. Il s’agira-là plutôt d’une introduction non annoncée sur le disque qu’autre chose, puisqu’au bout de 45 secondes, débute réellement la chanson.

L’ambiance est plus calme qu’à l’accoutumée. Certains diront que c’est l’album de la maturité. Hormis cette première chanson, on retrouve d’autres balades comme, par exemple Pen Friend qui reprend à peu près les mêmes bases, mais dont le refrain reste imparable et permet une petite envolée sympathique et aussi This One’s For You qui contient sa douceur tout le long de la chanson, malgré quelques tentatives de la batterie. La chanson qui donne son titre à l’album finira par trotter dans la tête notamment par son refrain et ses quelques notes de piano.

Et puis il y aura quelques chansons un peu plus énergiques, à commencer par The Archaelogist, sans doute le titre le plus immédiat de l’album et dans lequel on perçoit le plus distinctement le génie de Peter Von Poehl, mais aussi Lover’s Leap en deuxième position sur l’album et qui lui permet de définitivement convaincre l’auditeur de poursuivre l’écoute. Twenty Twelve One n’est pas en reste, avec une belle progression rythmique qu’on aimerait beaucoup voir jouer sur scène par un orchestre.

S’il y a bien un point commun à chaque album de Peter Von Poelh, c’est de toujours finir sur des chansons grandiloquentes, avec de longues introductions, un peu à la manière d’une chanson de fin d’un film, qui achève de faire sortir l’émotion. Paradise 28 n’échappe donc pas à cette règle, mais à vrai dire, ce n’est pas tellement un défaut.

Peter Von Poehl livre donc un nouvel opus fidèle à son style, mais tout-à-fait réussi. Il part d’ailleurs le présenter en tournée et malgré la timidité, qu’il arrive à dépasser régulièrement pour raconter des anecdotes sur lui ou sur ses chansons, il prend bel et bien sa place au devant de la scène, la guitare sous le coude. Vous savez déjà que vous n’aurez aucune chance de conclure pendant le concert. Alors ne faites pas les innocents ou les rabat-joie, mettez en pause les radars et profitez du spectacle ! Car ça en vaut la peine.

Peter Von Poehl – Big issues printed small – Disponible (pvp)

Note: ★★★½☆

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