1 – MAD MAX FURY ROAD

On ne connait aucune équivalence à l’entrée en matière de Mad Max Fury Road, furieuse et frénétique, qui laisse le spectateur dans un état de sidération totale. En à peine une demi-heure, George Miller réinvente la légende et donne aux fans de la trilogie originelle ce qu’ils attendaient depuis trente ans, rassasiés au delà de toute satiété. Et ce n’est que le début, le film dure deux heures et ne cessera jamais de tenir sa promesse de course-poursuite (quasi) ininterrompue. LIRE LA SUITE

2- CEMETERY OF SPLENDOUR

Apichatpong nous rappelle également que c’est le plus grand cinéaste organique. L’humanité existe par la force des éléments et des esprits et participe à l’équilibre du monde. On y respire des flacons de sperme, on y urine et défèque beaucoup aussi. Mais surtout, on est immergé dans la puissance naturaliste de certains plans. LIRE LA SUITE

3 – VICE VERSA

Pixar s’adresse moins aux enfants qu’aux adultes qui l’ont un jour été. Vice Versa s’inscrit dans la droite lignée de deux des plus belles réussites du studio : Toy Story 3 et Là-Haut. Qu’adviennent nos souvenirs quand nous sortons de l’enfance ? En faisant de cette question l’enjeu incommensurable de ses aventures, le studio touche notre corde sensible (pas la peine de jouer les blasés). LIRE LA SUITE

4 – MADRE MIA

On retrouve les thèmes chers à l’italien qui traduisent les épreuves de la vie : la maladie, les difficultés au travail, le destin individuel face à l’intérêt général, la famille. Nanni Moretti y joue le personnage du frère de la réalisatrice et ils vont se confronter tous les deux à la mort annoncée de leur mère. Le film oscille entre de très grandes scènes de comédie extravagantes pour la plupart soutenue par John Turturro qui livre une prestation à la hauteur du fantasque joueur de Bowling dans The Big Lebowski. LIRE LA SUITE

5 – INHERENT VICE

Le film est assez nébuleux et tordu, mais la ligne directrice reste claire et brasse tout un tas de sujets intéressants concernant l’Amérique d’alors : désillusion voire perversion des hippies (ils fricotent avec des nazis), fin des idéaux devenus mercantiles et retour au capitalisme triomphant (on entrevoit le gouverneur Reagan). LIRE LA SUITE

6 – IT FOLLOWS

Si le dispositif de mise en scène est particulièrement important dans les films horrifiques, le réalisateur proposera un style singulier et élégant, où l’esthétisme est mis à l’honneur. Les images sont parfaitement maîtrisées, rappelant parfois le grain de Gus Van Sant ou encore l’architecture de Carpenter, avec de longs et intenses travellings et des panoramiques effrénés. Le danger demeure, avec ardeur et exaltation. La mort n’a jamais semblé aussi proche. Et pourtant David Robert Mitchell parvient à insérer des plans emplis d’une douce poésie. LIRE LA SUITE

7 – HACKER

Mann, sensible à l’état du monde comme l’aiguille du microsillon, palpe le pouls du contemporain, c’est un cliché de le dire (avec toute sa part de justesse). Mais il s’agit de fixer la photographie de l’ère mondialisée et hyper connectée (…) Hacker, toujours tendu dans le mouvement, la vitesse, échappe gracieusement à la rigidité d’une représentation. Il sait que d’un temps il vaut mieux capter l’esprit, que figer le cliché. LIRE LA SUITE

8 – FOXCATCHER

Avec Foxcatcher, Bennett Miller clôt sa trilogie sur l’Amérique du réel, au travers de l’étude d’un troisième fait-divers, symptôme d’une tranche d’Amérique et témoin de la grande Histoire. Il signe aussi son film le plus fort, le plus ambitieux, le plus impressionnant en reconduisant les sillons et les motifs qui irradient son cinéma depuis The Cruise, un documentaire assez rare de 1998, le multi-oscarisé Truman Capote en 2005 et Moneyball (Le stratège) en 2011. LIRE LA SUITE

9 – ON THE OTHER SIDE

The other side est un documentaire choc et bouleversant sur les laissés pour compte d’une petite communauté perdue au fin fond de la Louisane. Le film de Roberto Minervini pose un regard juste sur les oubliés de l’Amérique qui vivent de petits trafics, détestent l’administration Obama, mais qui débordent tous d’humanité et d’amour pour les leurs. Le film est à la fois très dur dans ce qu’il montre de cette pauvreté – la scène où une strip-teaseuse enceinte se fait un shoot avant de monter sur scène – et beau dans la description des relations entre les protagonistes.

10 – THE VISIT

Alors que le cinéma d’horreur, sinistré, s’est mystérieusement réduit à ne plus proposer qu’effets tonitruants et tartines gore inopérantes, The Visit se pose comme vrai film de mise en scène (…) Aussi basique au fond que La Maison du diable, The Visit pourrait bien se poser comme nouveau départ, sur des bases assainies, et pour Shyamalan et pour le genre horrifique. LIRE LA SUITE

Les tops des rédacteurs

Morgan BIZET

2015 ne m’a pas emballé. J’ai même manqué la plupart des succès critiques, par désabusement face à ce qui a été l’année la plus noire du cinéma depuis que j’y vais de manière assidue : 2009. Exit donc les Mille et une nuits de Miguel Gomes et Foxcatcher de Bennett Miller (je me mords les doigts pour ces deux là, il faut l’admettre), les bulldozers Cannois (la palme d’or Dheepan, The Lobster ou Le Fils de Saul) ou les petites surprises comme Mustang. A côté de ça, je me suis infligé des déceptions ou des échecs monumentaux, à mon plus grand désarroi. Du mégalo oscarisé Birdman d’Inarritu au creux Hacker de Michael Mann en passant par les films grinçants, cyniques et indigestes, comme Les Nouveaux Sauvages ou Chronic de Miguel Franco… Au secours !
Mais une fois n’est pas coutume, Hollywood était à ma rescousse. Je parlais déjà dans mon top 2014 d’un nécessaire renouveau pour la machine à rêves américaine sous peine de définitivement sombrer sous la carcasse – pourtant pleine de vide – des productions Marvel et DC Comics. Si l’on a effectivement eu droit à de nombreux navets (Avengers 2, Jurassic World ou encore le dernier Hunger Games), 2015 fut l’année d’une possible renaissance pour Hollywood. Ce sont pas moins de quatre films qui viennent intégrer mon top, et quels films ! Entre exercices brillants (Vice-Versa, Le Pont des Espions) et puissants manifestes formels et merveilleux (Mad Max Fury Road et Star Wars 7), on tient là de sacrées propositions de cinéma.
Enfin, le cinéma d’auteur a évidemment sa place au panthéon des œuvres marquantes de 2015. Si je n’ai personnellement pas eu l’occasion de revivre des claques filmiques à la hauteur de Holy Motors, Cosmopolis, Twixt, Oncle Boonmee, Spring Breakers, Le Vent se lève, Super 8 ou P’tit Quinquin, plusieurs œuvres ont su se mettre au diapason et proposer de renversantes visions du monde et du cinéma.
Enjoy !

1- Cemetery Of Splendour d’Apichatpong Weerasethakul
2- Mia Madre de Nanni Moretti
3- Mad Max Fury Road de George Miller
4- Vice-Versa de Peter Docter
5- The Smell Of Us de Larry Clark
6- Jauja de Lisandro Alonso
7- Star Wars Episode VII : Le Réveil de la force de J.J. Abrams
8- Vers l’autre rive de Kiyoshi Kurosawa
9- Inherent Vice de Paul Thomas Anderson
10- Le Pont des espions de Steven Spielberg ex-aequo L’Ombre des femmes de Philippe Garrel

Solenne BOENO

1 – Summer
2 – Vice Versa
3 – Mad Max
4 – L’ombre des femmes
5 – Mia Madré
6 – It Follows
7 – Vers l’autre rive
8 – Le pont des Espions
9 – Jauja
10 – Star Wars le réveil de la force

Olivier BOREL

De 2015, j’ai envie de retenir, plus que tout autre, l’héroïne de Mia Madre. Margherita, réalisatrice, voit sa mère s’approcher de la mort. Son couple a lâché, sa fille traverse une mauvaise passe, son appartement est inondé et son tournage la met en difficulté à cause de son acteur ingérable. Tout se dérègle autour de Margherita et les choses semblent lui échapper comme le sable coule entre les doigts. C’est par la force de l’écoute, d’une attention accrue aux autres que Margherita, à défaut d’empêcher l’inéluctable mort de sa mère, reprendra le dessus.
Il n’est pas anodin que l’héroïne de Moretti soit réalisatrice, car quel art, sinon le cinéma, nécessite autant de composer avec l’impondérable, l’incontrôlable, tant les choses y échappent aux mains du chef d’orchestre. S’il est bien un domaine où l’artiste compose avec, et même bute face au réel, c’est le cinéma. Pourtant, ce réel, il faut bien faire avec. Faire le film malgré l’impossibilité d’avoir prise sur tout. Faire au mieux.
Si Mia Madre est un si beau film, c’est parce qu’il parle de ce « comment faire ». Comment faire avec le travail, avec la famille, avec le couple, avec tous les tracas qu’on n’avait pas voulus. La figure du cinéaste vaut dès lors pour métaphore de chacun face à l’environnement qui l’entoure.
Deux autres figures de chef d’orchestre ont marqué cette année. D’abord, Joie, au centre de Vice Versa, qui finira par comprendre que le bien-être de Riley, la petite fille dont elle occupe l’esprit, n’est possible qu’à condition de laisser voix au chapitre à chacune des émotions. Accepter de se mettre en retrait, donc, pour que les autres puissent faire ce pour quoi ils sont plus qualifiés que nous-même.
L’autre figure, c’est Donovan, l’avocat du Pont des espions. Bouleversant d’abord parce qu’il accepte d’endosser l’habit de la morale face à la vindicte de l’opinion en défendant un soviétique, bouleversant aussi parce que face au monde qui va mal, il se place au centre des différents acteurs pour faire en sorte que les choses se résolvent du mieux possible. Face aux difficultés qui compliquent l’échange de citoyens entre les États-Unis et l’URSS, Donovan oppose sa pugnacité et ne cède pas, il se tient droit et réussit à obtenir le « homecoming » de chacun.
Le monde va mal, rien de nouveau à cela. Mais les deux attentats qui, en moins d’un an, ont frappé Paris, nous ont peut-être rendus plus sensibles encore au chaos du monde. Parce qu’ils avaient lieu au pas de notre porte, ils ont provoqué en nous une réaction plus épidermique encore que ne le fait une actualité déjà accablante. Voici donc dix films, très différents mais tous très beaux qui, s’ils ne changent pas le monde, du moins peuvent nous consoler de son horreur. Non parce qu’ils fermeraient les écoutilles, mais parce qu’à l’exemple de Cemetery of Splendour, Hacker ou A la folie, ils ouvrent grand les oreilles. Comme disait Deleuze, le cinéma résiste. Face à la sidération que nous inspire l’état du monde, reste à faire des films. À plus forte raison quand ils prennent la forme galvanisante et le discours révolutionnaire de Mad Max Fury Road. À plus forte raison quand ces films sont capables de plans si puissants, si déchirants que celui qui clôt Cemetery of Splendour.
Tendre l’oreille aux bruits du monde, se tenir droit, ne jamais se soumettre : les temps qui viennent s’annoncent durs, mais les films de 2015 nous ont pourvus en bonnes résolutions pour les affronter.

1. Cemetery of Splendour
2. Mad Max Fury Road
3. Mia Madre
4. Le Pont des Espions
5. Hacker
6. Vice Versa
7. A la folie
8. Les Secrets des autres
9. Hill of Freedom
10. It Follows

Tony COELHO

Cette année aura été riche, très riche. Nous aurons eu le plaisir de voir des films d’une qualité rare, mais aussi très variés, des preuve d’une créativité et d’une curiosité flamboyante. Nous pourrions ici faire une liste bien longue des films qui ont retenu notre attention, mais la subjectivité doit faire son travail.
Je voudrais citer d’abord ceux qui n’auront pas la chance d’y figurer, à commencer par Star Wars que j’ai d’office mis de côté. Arrivé trop tard dans l’année et franchement hors catégorie, j’aurais vraiment, je pense, manqué de discernement en l’incluant aussi rapidement dans une liste qui a pris le temps de mûrir.
Ensuite, je voudrais mettre en avant des film comme Love and Mercy ou La rage au ventre qui sont des réalisations beaucoup trop classiques et des histoires déjà connues, mais qui restent des films plutôt bien foutus et intéressants. C’est le cas aussi de Imitation Game qui aurait fait bonne figure dans le classement au regard des interprétations.
J’aimerais parler aussi de La loi du marché là aussi d’une pertinence folle, avec l’interprétation magnifique de Vincent Lindon, notamment. Mais si la qualité est indéniable d’autres m’ont plus attiré. Dans un autre style, It Follows est une belle réussite et aurait également mérité une place. Côté plus léger, Kingsman remporte un vrai prix d’estime, une belle surprise vraiment. Enfin je citerais Réalité, qui m’a vraiment fait passer un bon moment. Malheureusement, l’histoire se perd au fur et à mesure que l’on avance.
J’ai en revanche été assez déçu par Tomorrowland qui aurait tellement pu développer une histoire plus intéressante que ça. C’en est presque désolant, tout comme Le Petit Prince, qui est un très joli film mais qui ne retranscrit pas suffisamment l’histoire du livre, laissant de côté tout un tas de choses pourtant loin d’être anodines et faisant apparaître un petit prince au final final assez déprimant… Là aussi c’est fort dommage.
Les vraies déceptions sont à chercher du côté de Tim Burton avec Big Eyes qui est un film d’un plat terrible, de Michael Mann avec Hacker qui laisse transparaître tout un tas de ressorts ultraconnus et une dérive lente vers la violence, et enfin un Jurassic World qui démarrait très bien pour finir sur des théories franchement naïves et sans cohérence.
Allez, trêve de papotages, passons au fameux classement !

1 – Inherent Vice – Paul thomas Anderson
C’est un film un peu flou, un peu fou, un peu tout ce qu’on voudra ! Un film typiquement comme je les aime, à l’ambiance assez décalée, une histoire alambiquée, volontairement complexifiée et loufoque, mais aussi rempli de petits détails à mourir de rire qu’on l’on remarque qu’à force de le regarder. En plus, porté par des acteurs sensationnels dont Joaquim Phoenix qui réalise le doublé puisque déjà en tête de gondole sur mon classement de l’année dernière avec Her de Spike Jonze.

2 – This Is Not A Love Story – Alfonso Gomez-Rejon
Ce film m’est apparu un peu sur le tard, au gré de mes pérégrinations, et je suis littéralement tombé sous le charme. C’est vrai que l’histoire est déjà connue, mais le traitement et le ton tenus dans ce film sont d’une telle justesse que je ne pouvais pas rester insensible. Il y a de magnifiques trouvailles, des acteurs attachants et convaincants et de l’humour juste comme il faut !

3 – Vice Versa – Pete Docter
On met du temps à entrer dans ce film, à en comprendre le fonctionnement et le propos. Mais une fois l’histoire et les éléments intégrés, on adhère dès lors sans réserve. Chacun d’entre-nous se revoit un peu dans cette histoire, d’une façon ou d’une autre. Le film nous touche tous. Fourmillant d’idées plutôt bien traitées, l’humour et les personnages hauts en couleurs font au final la différence, sans forcer.

4 – The Lobster – Yorgos Lanthimos
Ce film est assez controversé dans mon entourage. Je l’ai de mon côté trouvé des plus intéressants. Il faut, il est vrai, adhérer à l’hypothèse de départ et prendre un peu de recul dans tout ça pour comprendre a minima les positions de ces humains qui tentent de vivre et de s’en sortir comme ils peuvent, selon les idées et les règles qu’ils se sont imposées. Une critique intéressante qui nous pousse à réfléchir sur les positions sur les opinions qu’on supporte aujourd’hui, dans notre monde.

5 – Ex Machina – Alex Garland
Un huis-clos étonnant. porté par des acteurs très sobres et impliqués. L’histoire de Ex Machina qui semble portée sur l’intelligence artificielle, interroge en réalité sur bien d’autres choses. La photographie et la mise en scène très soignées portent le spectateur dans cet espace qui reste assez oppressant. Qui se joue de qui au final ? À quel moment se croisent la réalité et l’invention ? Une belle interrogation.

6 – Mad Max Fury Road – George Miller
On passe à quelque chose de plus direct et de plus grand public. Le retour de Mad Max est une véritable réussite ! Le scénario est très simple et pourtant il nous tient en haleine pendant toute la durée du film, nous poussant même à nous créer nos propres histoires et de comprendre le fonctionnement des différents clans que l’on croise dans cette longue poursuite. Visuellement, c’est beau, c’est spectaculaire et ça fait du bien !

7 – Les Nouveaux Sauvages – Damian Szifron
Succession de courts métrages portant sur une thématique commune, ce film est une véritable respiration. On a tous eu envie, un jour, de se laisser aller à nos pulsions. Et voir le résultat potentiel en action – avec un humour parfois noir – , nous permet simplement de nous libérer ! C’est un fait un film thérapie qui ne se le dit pas. Ce fut en tout cas une belle surprise.

8 – Birdman – Alejandro Gonzalez Inarritu
Un plan-séquence d’une heure et demie. Cela en laisse perplexe plus d’un. Pourtant. Le parti pris oblige à la fois le réalisateur et le spectateur. C’est une autre façon de faire. Une simple discussion entre deux personnes devient une obligation de nous porter d’un côté ou de l’autre, ne permettant pas de voir l’autre répondre. Comme si nous étions dans l’histoire au côté de quelqu’un qui petit-à-petit sombre, noyé par ses démons.

9 – Une Belle Fin – Uberto Pasolini
Là aussi, porté par mes propres recherches je suis tombé sur Une belle Fin et il m’a laissé une forte impression. L’histoire est plutôt incongrue, mais surtout très réaliste et donc un peu fade. porté par un exceptionnel Eddie Marsan, à la fois un peu triste, dévoué et attachant. Ce film sans prétentions parvient à aller au plus profond de nous.

10 Foxcatcher – Bennett Miller
L’histoire n’est pas commode… Parler de lutte gréco-romaine est assez osé. En réalité, ce n’est pas tellement ce sport qui nous intéresse, mais ce qui se joue dans ce trio infernal entre les Frère Schultz et John Du Pont. Si Steve Carell est incroyable, j’ai surtout été bluffé par Mark Ruffalo, encore une fois impérial. Il est difficile de comprendre qui tire les ficelles et ce qui se joue, et c’est en ça que Foxcatcher est haletant.

Camille HERVE

1 – Mad Max – Fury Road
2 – La bataille de la montagne du tigre
3 – The other side
4 – Hill of freedom
5 – Cemetery of splendour
6 – Vice versa
7 – Inherent vice
8 – Hotel Transylvanie 2
9 – Foxcatcher
10 – Les nouveaux héros

Yannick LACOMBE

L’année 2015 nous a sans aucun doute offert de très grands gestes de cinéma.

Le plus absolu, le plus poétique, le plus engagé, le plus onirique est celui du thaïlandais Apichatpong Weerasethakul, avec Cemetery of splendour. Son film, le plus personnel, nous plonge au cœur d’une Thaïlande épuisée par une monarchie autoritaire qui dévitalise – littéralement – sa culture, ses racines, sa nature, ses soldats, sa beauté. Le geste du cinéaste est magnifique, unique sur l’échiquier de la création. Un chef-d’œuvre exceptionnel.

Jauja de Lisandro Alonso appartient à la même catégorie. Un film empreint d’une audace formelle radicale qui revisite une Odyssée de l’espace sous les apparats du western aux fins-fonds de la Patagonie avec un Viggo Mortensen magnétique. Subliment auteuriste, fondamentalement magnétique.

Ce qui frappe aussi dans cette année de cinéma, c’est la revisite du Genre avec une ambition artistique incroyablement exigeante conjuguée à une volonté de parler de notre temps. Mad Max : Fury Road, It follows ou The visit en sont les plus grands ravissements. Tantôt féministes, tantôt incandescentes, tantôt introspectives d’une jeunesse démagnétisée, tantôt engagées, les trois œuvres nous offrent ce que le cinéma de genre a de meilleur. Mad Max : Fury Road étant résolument celui qui donne le plus à jouir.

Le cinéma français nous a également révélé un nouveau champion : Thomas Salvador. Le cinéaste nous livre un premier film de super héros ordinaire comme une parabole de la différence qui prend une ampleur politique dans son dernier segment. Vincent n’a pas d’écaille est la très belle révélation de cette année 2015.

On retrouve aussi quelques maîtres en pleine forme : Nanni Moretti avec son bouleversant et torturé Mia Madre et Jia Zhang-Ke avec , en salle le 23 décembre, la palme d’or oubliée du dernier festival de Cannes.

Larry Clark et Bennett Miller complètent ce top 10. Une ode à la liberté et à la transgression avec The smell of us, toujours aussi puissamment incandescent. Un biopic d’une grande élégance dans sa mise en scène, avec Foxcatcher.

Les très beaux films de Philippe Faucon (Fatima), Quentin Dupieux (Réalité), Pete Docter (Vice-Versa), Guillaume Nicloux (Valley of Love) ou Denis Villeneuve (Sicario) auraient mérité qu’on s’y arrête dans ce bilan annuel. Preuve que 2015 restera comme un excellent cru de la planète cinéma.

1- Cemetery of splendour d’Apichatpong Weerasethakul
2- Mad Max : Fury Road de George Miller
3- Au delà des montagnes de Jia Zhang-Ke
4- The Visit de M. Night Shyamalan
5- It follows de David Robert Mitchell
6- Mia Madre de Nanni Moretti
7- Vincent n’a pas d’écaille de Thomas Salvador
8- Foxcatcher de Bennett Miller
9- Jauja de Lisandro Alonso
10- The smell of us de Larry Clark

Frédéric RACKAY

1 – Mad Max Fury Road
2 – Hacker
3 – Foxcatcher
4 – Vice Versa
5 – Inherent Vice
6 – The Visit
7 – The other side
8 – Cemetery of splendour
9 – Star Wars – Le réveil de la force
10 – Hill of freedom

L’année 2015 aura été à n’ en point douter une belle année de cinéma qui aura permis de voir s’accomplir deux plaisirs de cinéphiles nostalgiques, le retour de Max Rockatansky sur grand écran et la renaissance de la saga Star Wars.

Que Mad Max Fury Road ait pu voir le jour dans le contexte ultra normé d’Hollywood est une anomalie magnifique, George Miller n’a rien cédé et a réussi à plier le système au bénéfice de son statut d’auteur exigeant, jusqu’au boutiste et visionnaire. Et ça, c’est une bonne nouvelle. Cette année, J.J. Abrams a lui aussi réactualisé une franchise à succès, mais là où son collègue australien est un véritable artiste qui a poussé le plus loin possible la conception de son univers, le réalisateur du Réveil de la Force a misé davantage sur un strict cahier des charges à destination de la fanbase, sans aucun risque ni surprise notoire, en honnête artisan. Inutile cependant de bouder son plaisir, si l’épisode 7 n’est – ni plus ni moins – qu’un remake du film de 1977, on ne peut nier l’émotion des retrouvailles ni l’efficacité réelle d’un récit parfaitement mené, conforme à ce que l’on attendait de la saga après la souillure que fut la prélogie de Lucas.

Disons ici quelques mots sur deux cinéastes qui ont sorti des films mal aimés cette année : Michael Mann et M Night Shyamalan. Beaucoup de spectateurs n’ont vu dans Hacker qu’un cyber thriller sans génie, alors que le film est d’une contemporanéité et d’une invention folles, la mise en scène saisissant le monde du virtuel pour le faire basculer in fine dans quelque chose d’archaïque. Moderne, avant-gardiste, toujours expérimental, elle tend aussi vers une forme d’abstraction. Et puis on retrouve dans Hacker tout ce qui fait l’univers mannien, la solitude du personnage principal, un taiseux qui est aussi le meilleur dans son domaine, la séquence de la fusillade comme un exercice de style obligé mais sans cesse renouvelé et toujours impressionnant de violence fulgurante, la façon de filmer la ville… C’est exceptionnel.

On comprend mieux le désamour du public pour M Night Shyamalan, qui a accusé un sérieux coup de mou depuis Phénomènes. Il revient avec ce qui pourrait apparaître comme un film mineur, mais The Visit déjoue ce pronostic a minima pour s’imposer comme ce que l’on a vu de mieux dans le genre depuis belles lurettes. L’erreur serait de considérer le film comme un found footage, ce qu’il n’est définitivement pas. Le réalisateur théorise une nouvelle fois son cinéma, interroge le regard du spectateur sur ce qu’il lui donne à voir et invente une image qui résume son propos comme il le fait dans chacun de ses films. Ici, c’est celle de Becca, adolescente qui refuse de se regarder dans une glace et qui la première fois qu’elle ouvre les yeux face à un miroir, caméra en main, y voit refléter l’horreur à l’état pur.

Enfin, terminons ce rapide panorama avec un film dont nous n’avons malheureusement pas parlé ici, The other side, un documentaire choc et bouleversant sur les laissés pour compte d’une petite communauté perdue au fin fond de la Louisane. Le film de Roberto Minervini pose un regard juste sur les oubliés de l’Amérique qui vivent de petits trafics, détestent l’administration Obama, mais qui débordent tous d’humanité et d’amour pour les leurs. Le film est à la fois très dur dans ce qu’il montre de cette pauvreté – la scène où une strip-teaseuse enceinte se fait un shoot avant de monter sur scène – et beau dans la description des relations entre les protagonistes. Puis aux deux tiers du métrage, Roberto Minervini nous emmène sans coup férir suivre une milice armée s’entraîner au Texas pour préparer la guerre civile qu’ils prévoient pour bientôt. Ici, toujours un point commun, cet esprit de corps, de confrérie. Une vision de l’Amérique comme on n’en voit très peu souvent, sans voyeurisme ni concession.

Carlos SOLANO

1 – Les mille et une nuits (Miguel Gomes)
2 – Cemetery of Splendour (Apichatpong Weerasethakul)
3 – Prix Suisse : remerciements, mort ou vif (Jean-Luc Godard)
4 – Notre héritage (Jonathan Vinel)
5 – Inherent Vice (Paul Thomas Anderson)
6 – It Follows (David Robert Mitchell)
7 – Spectre (Sam Mendes)
8 – Mia madre (Nanni Moretti)
9 – Queen of Earth (Alex Ross Perry)
10 – L’ombre des femmes (Philippe Garrel)

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