À voir ces Contes Italiens, difficile d’élucider ce qui a poussé les Taviani à porter à l’écran le Décaméron.

Dans la Toscane de 1348, dix jeunes gens fuient la peste qui sévit à Florence et s’en vont sur les hauteurs de la ville. Pendant dix jours, ils font passer le temps en se racontant tour à tour des histoires, tantôt tragiques, tantôt comiques. Le caractère volontiers paillard de ce classique avait déjà séduit Pasolini, ainsi que quatre cinéastes italiens auteurs du film à sketch Boccace 70.

Dans leur version, les Taviani en passent par une mise en contexte qui déjà pose problème. Les précédentes adaptations faisaient l’économie du récit-cadre pour entrer directement dans la matière des contes. Les frères toscans recourent quant-à eux à une longue séquence introductive peignant Florence en proie à la peste. Volontiers pompière dans sa manière de s’attarder avec force détail sur les bubons, pas aidée par une musique tonitruante assénée à la truelle, la mise en scène laisse augurer du pire. Et ça ne s’arrange guère quand le récit de contes commence enfin. Les Taviani en font des tonnes et surtout irritent par leur manque de confiance en la capacité des images à raconter. Trop souvent la bande-son vient répéter ce que l’image exprime très bien toute seule. Quand un amoureux se penche sur une morte revenue à la vie, le plan de l’oreille contre le cœur suffit à faire entendre le bruit du battement, et pourtant un bruitage vient répéter ce qui se comprend déjà par le cadrage seul.

Les réalisateurs parsèment cette mise en scène illustrative de plans-tableaux sur une Toscane de carte postale, où les acteurs dûment costumés adoptent des poses statufiées. Il faut dire que le casting, composé de jeunes gens aussi beaux que leur jeu est fade, n’aide en rien l’entreprise.

Un sentiment de gâchis l’emporte, car qui a ouvert le livre de Boccace sait combien ces nouvelles charment par leur légèreté, leur drôlerie. Cette nouvelle adaptation laisse nostalgique du film de Pasolini et de son inventivité plastique, refusant ne serait-ce que dans les choix de costumes l’asservissement à la petite reconstitution historique. Cette échappée solaire dans une Toscane médiévale informée par l’imagination du cinéaste recelait une poésie dont ne s’approche jamais la nouvelle version. Pasolini puisait dans l’œuvre de Boccace pour générer ses propres visions, alors que les Taviani ne livrent ici qu’une grossière illustration pour cours d’histoire de collège.

Note: ★☆☆☆☆

partager cet article